dimanche 28 octobre 2012

Méthodologie du business plan


Pourquoi construire un business-plan ?
Si les objectifs principaux de la construction d’un business-plan
ont été rapidement présentés en introduction ; il convient maintenant
d’y revenir plus en détail. Le but est cette fois-ci de tenter
de définir quel type de business-plan devra être établi selon l’usage principal
que l’on entend en faire. On conçoit bien, en effet, que si ce document
doit faire l’objet d’une large communication, le détail de certaines
orientations stratégiques ne pourra pas être communiqué au risque de voir
ces éléments aboutir entre les mains de la concurrence.


11. Le business-plan de création
La création est ici prise au sens large. Elle peut couvrir plusieurs cas que
nous décrivons brièvement.
11.1. La création d’une entreprise
C’est probablement le cas le plus complexe que l’on puisse rencontrer
puisque le créateur ne dispose d’aucun historique.
Il faudra tout “inventer”, c’est-à-dire tout prévoir depuis le montant à
dépenser pour construire une usine jusqu’à la consommation de fournitures
de bureau.
Même si ce business-plan est le plus difficile à établir, il n’en est pas moins
totalement indispensable. On peut au minimum recenser trois utilités
essentielles :


Valider la faisabilité financière du projet

Il s’agit de vérifier que l’entreprise que l’on envisage de créer peut dégager
des résultats et de connaître leur niveau probable. Cette vérification
ne peut être obtenue qu’en réalisant une projection sur une durée assez
longue. On sait en effet que, de manière classique, une création se
solde en général dans les premiers temps par des pertes. Ce n’est
qu’après trois ans, voire plus, qu’apparaissent normalement l’équilibre
puis les bénéfices.

Convaincre de futurs actionnaires

Si la création de l’entreprise suppose de lever des capitaux plus ou
moins importants, il faudra convaincre les futurs associés de l’intérêt
du projet. Le business-plan remplira ce rôle puisqu’il mettra, en face de
l’investissement à réaliser par les futurs actionnaires, les profits que
ceux-ci peuvent attendre. Ces profits s’exprimeront :
• par la capacité de l’entreprise, à réaliser dans l’avenir des profits
permettant de distribuer des dividendes,
• par l’évaluation à terme de l’entreprise, compte tenu des performances
prévues. Cette évaluation mettra en évidence la plus-value
que peuvent espérer les actionnaires.
C’est de cette manière, et en fonction de ces éléments provenant du
business-plan, que les sociétés de capital-risque spécialisées dans le
“start-up” se prononcent pour savoir si elles accepteront ou non de participer
au financement d’une nouvelle société.

Obtenir des financements

Même si un capital de départ a été rassemblé, il sera en général également
nécessaire de faire appel à des financements bancaires pour :
• réaliser les investissements,
• financer, du moins en partie, le besoin en fonds de roulement de
l’entreprise à créer.
Pour convaincre les banquiers, il est nécessaire de présenter un plan
précis leur permettant d’apprécier leurs risques et de définir le niveau
de leurs engagements éventuels.
Notons enfin qu’en cas de création au-delà de la présentation d’un business-
plan crédible, c’est de loin, et peut-être avant tout, la personnalité du

créateur qui emportera la décision des financiers, qu’ils soient capital-risqueurs
ou banquiers. Ces derniers seront toutefois également sensibles aux
garanties données.


11.2. La reproduction d’une entreprise

Il s’agit ici encore de construire le business-plan d’une création. Tel est le
cas d’une entreprise régionale qui crée une filiale pour s’implanter dans
une région où elle ne l’était pas, voire dans un pays différent.
Ce cas est relativement moins complexe puisque le modèle existe. Il suffira,
si l’on peut dire, de se demander en quoi l’entreprise nouvelle différera
ou non de celle déjà existante.
Les buts de l’établissement du business-plan sont identiques à ceux déjà
examinés au paragraphe 10.1. On peut toutefois en ajouter un. Ce nouvel
intérêt est de définir quelle dotation en capital sera attribuée par la société
existante à sa nouvelle filiale. En effet, dans le cas de la création d’une
filiale, la société-mère a parfois le choix entre :
– Faire un apport significatif en capital.
– Limiter l’apport en capital au profit de prêts en compte courant
qu’elle pourra récupérer dès que la filiale commencera à dégager des
flux de trésorerie positive. Cette stratégie est particulièrement intéressante
en cas d’implantation dans des pays où le rapatriement de
résultats est ou risque d’être réglementé.

– Limiter l’apport en capital et en compte courant en augmentant les
emprunts grâce à des garanties données par la société-mère afin de
dépasser les ratios habituellement acceptés (cf. chapitre 3). Cette formule
se révèle particulièrement intéressante en cas d’investissement
dans un pays étranger puisqu’elle évite à l’entreprise d’origine de
subir d’éventuels risques de change sur son investissement.


11.3. Les grands projets

Chaque fois qu’une société envisage un projet dont la taille est telle qu’elle
modifie fondamentalement la situation de l’entreprise, il est alors nécessaire
de bâtir un business-plan spécifique. On parlera dans ce cas de “gestion
de projet”.
Le business-plan devra :
• d’une part, tenter de mesurer la rentabilité spécifique du projet. Tel
sera par exemple le cas si l’on décide de construire une nouvelle

usine ou d’adjoindre aux activités de l’entreprise une nouvelle
gamme de produits ;
• d’autre part, de mettre en évidence quelle sera à terme la situation
globale de l’entreprise si elle lance le projet étudié.


11.4. Le suivi des projets de création

Si, comme nous le verrons plus loin, un business-plan doit toujours faire
l’objet d’un suivi, cela est encore plus indispensable en cas de projet de
création, dans la mesure où :
• les enjeux sont souvent majeurs ;
• les risques de dérapage sont très importants. Chacun sait en effet
qu’un projet mal contrôlé coûte plus cher que prévu et prend du
retard ;
• lors d’une création par un nouvel entrepreneur, les dérapages éventuels
peuvent saper à tout jamais sa crédibilité auprès de ses interlocuteurs.


12. Le business-plan dans la gestion courante

Quatre utilités principales sont recensées ci-après. Les trois premières peuvent
s’adresser à toutes les sociétés, la quatrième ne concerne quant à elle
que les groupes de sociétés.

12.1. Coordonner l’action à moyen terme

Une des difficultés des entreprises, dès qu’elles dépassent la taille artisanale,
est d’obtenir que les différentes fonctions qui les composent opèrent
de manière concertée et non désordonnée.
Si, à titre d’exemple, on représente l’organigramme très simplifié d’une
affaire industrielle, on trouve fréquemment une structure du type de celle
représentée ci-dessous :


Pour que l’entreprise réussisse, il est indispensable :
qu’il existe un consensus sur l’avenir de l’entreprise. Le consensus
général est habituellement le plus facile à obtenir car il est, sinon
imposé, du moins fortement “proposé” par la direction.
que l’ensemble des décisions prises au niveau des différentes fonctions
de l’entreprise soient à la fois cohérentes avec l’objectif global
et cohérentes entre elles. Ainsi, ne servirait-il probablement à rien
d’investir pour augmenter la capacité de l’outil industriel si le service
commercial n’était pas renforcé afin d’écouler les produits que ce
surcroît de capacité permettrait de produire.
Il serait tout aussi inefficace de tenter de vendre plus si l’entreprise
ne disposait pas d’une capacité de production suffisante et si le
recours à la sous-traitance était pour une raison ou pour une autre
impossible. Enfin, s’il est possible, grâce à des investissements simultanés,
d’augmenter le chiffre d’affaires et de produire ce que l’on va
vendre, cela suppose, de plus, une action du financier. Il faudra que
celui-ci ait simultanément mis en place les financements indispensables,
tant pour ce qui est des investissements que du besoin en
fonds de roulement. Cette coordination indispensable entre ces
grandes fonctions de l’entreprise l’est également au sein de ces fonctions.
Pourquoi, au niveau informatique, mettre en place un système
de gestion comptable en temps réel, si rien n’est fait pour rattraper
le retard chronique des services administratifs et comptables utilisateurs
de ce système ?


C’est donc une des finalités du business-plan que d’assurer cette coordination
sur le moyen terme, coordination qui devra évidemment être reprise
et affinée au niveau des budgets annuels.
Pour que le business-plan puisse répondre à cette finalité, son mode de
construction sera essentiel. Le business-plan ne remplira ce rôle qu’à deux
conditions :
• être le résultat d’une concertation entre les différentes fonctions de
l’entreprise et avec les services financiers chargés de sa concrétisation
sous forme chiffrée ;
• être largement communiqué et commenté au sein de l’entreprise,
lors de son établissement et de sa révision périodique. Une communication
ponctuelle n’est toutefois pas suffisante même si elle
est indispensable. Le business-plan devra devenir, en plus du budget,
une référence permanente de l’entreprise.


Il devra donc dans ce cas exister deux versions du business-plan : une version
limitée aux seules personnes habilitées à avoir accès aux détails les

plus secrets de la stratégie. Une seconde version destinée à une diffusion
plus large. Ces deux documents ne seront en fait pas différents. On se
contentera pour la version à diffusion large de “gommer” les points délicats
sans pour autant modifier les résultats globaux prévus. On peut raisonnablement
penser que plus ce type de “mensonges par omission” sera
limité et plus l’utilisation du business-plan sera performante. Enfin,
n’oublions pas que le fait de couvrir un fait ou un projet du sceau du
secret est en général la meilleure façon d’attirer l’attention et d’attiser les
curiosités.


12.2. Fournir une prévision globale et cohérente

Dans toute entreprise, il existe de nombreuses prévisions et ce, à des
niveaux très différents.
Le vendeur tente de prévoir ses ventes du mois, de l’année et quelquefois
à plus long terme. Cette anticipation lui permet d’estimer sa
rémunération future et, éventuellement, son intérêt à envisager un
changement de poste ou d’employeur.
Le service technique organise sa production non seulement en fonction
des commandes connues et enregistrées mais également de
celles qu’il peut estimer. Il réalise cette estimation en fonction de ses
relations avec les services commerciaux ou quelquefois des enseignements
du passé.
Le financier, pour négocier avec son ou ses banquiers, tente de prévoir
ses encaissements et décaissements futurs et d’en tirer les conséquences
au niveau des besoins ou des excédents de trésorerie prévisibles.
Le président lors de l’assemblée générale annuelle donne à ses associés
des indications sur l’activité et les résultats prévisibles pour
l’année en cours et parfois les années à venir.


On pourrait continuer longuement cette énumération sans pour autant
avoir la certitude d’être exhaustif.
Toutes ces prévisions sont utiles et même indispensables. Il n’est pas question
d’en retirer l’initiative et la maîtrise aux différentes personnes concernées
pour tout centraliser. Les conséquences de la planification dans les
pays communistes n’encouragent pas à aller dans ce sens. Le but du business-
plan n’est donc pas de se substituer aux prévisions de détail mais d’en
assurer la cohérence et d’éviter par là-même des décisions contraires les
unes aux autres et donc néfastes au bon fonctionnement de l’entreprise.


– Le commerçant qui aura connaissance du business-plan ne sera pas
plus renseigné sur ses ventes de la semaine à venir. Celles-ci dépendent
d’ailleurs largement à aussi court terme de son propre niveau
d’activité et d’efficacité. Par contre, il saura si l’entreprise entend se
développer dans les années à venir, si ce développement sera réalisé
sur la gamme de produits ou la région dont il a la responsabilité ou
sur de nouvelles gammes de produits ou de nouveaux secteurs.

– Le service technique ne trouvera pas dans le business-plan la réponse
à ses problèmes de lancement du mois ou de la semaine. Par contre,
il pourra en fonction de celui-ci décider s’il est ou non nécessaire
d’investir dans l’étude de l’automatisation de telle ou telle production
ou s’il est préférable de poursuivre durablement dans le cadre du
processus actuel.


– Le financier pourra discuter clairement avec ses banquiers en leur
parlant non seulement de son besoin à court terme mais en replaçant
celui-ci dans un cadre plus large. Une telle approche est toujours rassurante
pour ses interlocuteurs. Il est évident qu’un tel outil lui permettra,
en ayant une vision à moyen terme, de choisir les financements
les mieux adaptés aux besoins (durées, taux, modalités, etc.).

– Le président ne courra pas le risque de tenir à ses actionnaires, des
discours incohérents d’une année sur l’autre et, de ce fait, de déstabiliser
son actionnariat. Cette vision à long terme et cette cohérence
sont encore plus indispensables s’il est nécessaire de demander aux
actionnaires un effort particulier (abandon ou limitation du dividende,
augmentation de capital par eux-mêmes ou par ouverture de
celui-ci à de nouveaux partenaires, etc.).


Ces quelques exemples mettent en évidence l’intérêt pour l’entreprise de
disposer d’une prévision à moyen terme. Notons qu’en réalité, ce n’est pas
tant le business-plan qui permettra de répondre à ces différentes questions
que le fait de l’avoir établi et la réflexion coordonnée que cela suppose.


12.3. Communiquer à l’intérieur de la société

Dans l’entreprise moderne, la décision est rarement solitaire et elle a pratiquement
toujours des conséquences au niveau des autres fonctions et de
l’entreprise ainsi qu’au niveau global. Il est donc indispensable de communiquer.
Le business-plan est-il un outil de communication ? Oui et ce,
principalement à deux niveaux :




Lors de son établissement et de sa révision
Le business-plan, qui nécessite obligatoirement une réflexion préalable,
constitue une occasion privilégiée de :
– Définir les points sur lesquels il y a accord et éventuellement ceux où
cet accord n’existe pas. Notons que l’accord est en général plus facile
à obtenir sur des objectifs globaux, moins pollués que les décisions
courantes par les micro-conflits qui empoisonnent fréquemment le
climat de l’entreprise. Il est même probable que l’accord sur les
grands principes et les grandes décisions devrait faciliter par la suite
le règlement des désaccords constatés au jour le jour.
– Faire travailler en commun des hommes et des femmes qui n’ont
dans la fièvre de la gestion courante que trop peu d’occasion de le
faire.
– Communiquer dans l’entreprise non seulement un plan mais des
valeurs. Il n’est pas inutile de rappeler, lors de l’élaboration de chaque
nouveau business-plan, quelles sont les grandes valeurs auxquelles
répond l’existence même de l’entreprise.


Un business-plan n’est pas un projet d’entreprise. Il doit cependant
mettre en évidence que celui-ci existe, qu’il soit ou non écrit, et que
c’est vers son accomplissement que doivent être tendues les énergies
dans l’entreprise.


En cours de vie
– Lors de toute décision importante, la référence au business-plan doit
devenir un réflexe. À propos de toute décision significative, il faudra
donc s’interroger :
• S’agit-il d’une décision s’intégrant dans les objectifs définis dans le
business-plan, à la fois quant à sa finalité (respect de la stratégie et
du projet) et à son niveau (montant de l’investissement prévu) ?
• ou d’une décision non cohérente avec le business-plan ? Ce type de
décision devrait ne pouvoir être prise qu’à haut niveau car elle suppose
une modification ou un infléchissement de la stratégie. Dans
l’absolu, toute décision importante qui ne serait pas en accord avec
le business-plan devrait amener une modification de celui-ci. Cela
ne sera évidemment pas toujours le cas mais devra l’être :
– si la décision prise est d’importance (montant élevé),
– ou si la décision exprime une véritable modification stratégique
et non simplement un infléchissement de celle-ci.


Lors de l’établissement des budgets annuels, il sera indispensable de
vérifier la cohérence entre le court et le moyen terme (budget et business-
plan). En fait, il s’agit plus d’une simple vérification de cohérence
puisque la démarche à suivre devrait être celle décrite dans le
schéma 1.1.



Figure 1.1 - Vérification de cohérence entre le budget

et le business-plan.
Ce schéma met en évidence que si le budget n’est pas conforme au business-
plan, soit dans ses objectifs, soit dans son chiffrage, on devra selon les
cas :
– modifier le budget afin de le rendre conforme. Encore faut-il que ce
nouveau budget soit réaliste et acceptable pour ceux qui auront la
charge de le mettre en oeuvre dans l’année à venir ;
– modifier le business-plan afin de tenir compte des évolutions constatées,
soit dans les marchés, soit au niveau des choix stratégiques de
l’entreprise.

La réalité est souvent plus complexe que ne peut le décrire un schéma. Il
peut exister plusieurs contrôles de cohérence successifs puisque le processus
budgétaire est lui-même itératif.

12.4.Mesurer les dérives et mettre en oeuvre les actions correctives

Le rôle du business-plan n’est pas de se substituer au budget dans la mise
sous contrôle de la gestion courante de l’entreprise. Le calcul et l’explication
des écarts resteront donc bien du domaine du contrôle de gestion.
Le business-plan sera utilisé pour mesurer ou tenter de mesurer les dérives
éventuelles sur le moyen terme.
Cette mesure pourra porter soit sur les aspects stratégiques, soit sur les
aspects financiers. Ces derniers ne sont fréquemment que la conséquence
des premiers.




Exemples d’écarts stratégiques

– Les prix de revient de la société ne diminuent pas normalement en
fonction du principe de la courbe d’expérience.
– Les positions sur le ou les marchés des produits ne sont pas
conformes à ce qui avait été prévu par le business-plan.
– Il apparaît de nouveaux entrants sur le marché qui mettent en cause
la répartition des ventes prévues entre les intervenants connus et
répertoriés lors de l’analyse stratégique.
– Les projets n’ont pas été lancés comme prévu et leur avancement
n’est pas conforme à ce qui avait été envisagé.
– Etc.


Exemples d’écart financier

– Les résultats ne sont pas conformes à la prévision (il s’agit ici de
résultats annuels ou éventuellement semestriels).
– Les augmentations de fonds propres ou le recours à l’emprunt que
nécessitent les investissements n’ont pas été obtenus, ou pas obtenus
dans les conditions prévues.
– Etc.
L’ampleur des questions posées montre à l’évidence qu’il ne peut s’agir
d’interrogations permanentes. Ce sera plutôt le résultat d’une étude
annuelle, souvent liée à la sortie des résultats définitifs d’un exercice.


Une telle périodicité présente l’avantage d’être cohérente avec la procédure
budgétaire. En effet, les écarts constatés conduiront soit :
• à prendre des décisions nouvelles de nature à faire disparaître le
“gap” constaté entre le business-plan et la réalité. Ces décisions
devront évidemment être intégrées dans la nouvelle prévision budgétaire
pour la période à venir ;
• à modifier le business-plan afin de l’adapter à la réalité. Il faudra
alors modifier en conséquence les prévisions de la période restant à
courir ainsi que les prévisions des années postérieures.
Dans un cas comme dans l’autre, se posera là encore un sérieux problème
de communication. Celui-ci peut s’avérer délicat s’il convient de justifier
un infléchissement stratégique majeur.
Une telle explication suppose que le rôle du business-plan ait été bien
compris. Il convient donc, lors de la mise en place de cette technique,
d’insister sur le fait que le business-plan ne constitue pas un dogme qui ne
pourrait en aucun cas être remis en cause. Il ne doit pas non plus apparaître
comme une prévision sans réalité, puisque remise en cause en permanence.

Comme toujours, rien n’est plus difficile que de trouver le juste équilibre.


12.5. Prévoir et coordonner les actions des filiales

L’on constate de plus en plus que les entreprises même de taille relativement
modeste ont en fait tendance à se transformer en groupe. Ces petits
groupes ne comportent qu’un nombre de sociétés limité (la notion de
groupe commence à partir de deux sociétés).
On peut trouver à ce phénomène plusieurs explications.
La répartition d’une activité entre plusieurs sociétés peut avoir pour
but une meilleure gestion en isolant les sous-métiers de l’entreprise
(technique, commercial et après-vente par exemple).
Cette séparation peut permettre d’améliorer la motivation des
hommes et en particulier des dirigeants. C’est également fréquemment
le moyen de responsabiliser les équipes ou les dirigeants, non
seulement sur leurs résultats mais également sur les aspects de
besoins de financement. La filialisation leur impose, en plus de la
gestion d’un compte de résultat, ce que permet une bonne comptabilité
analytique, de devoir maîtriser la gestion d’un bilan.

Cette séparation est parfois historique dans la mesure où le groupe
s’est, du moins pour partie, créé par rachat d’entreprise. Le regroupement
par le biais d’opérations de fusion ou assimilées n’est pas
toujours réalisé.
Enfin, l’internationalisation nécessite en pratique l’existence de
filiales dès que l’on cesse de pratiquer des exportations pour réaliser
des implantations locales. Cela est le plus souvent nécessaire, même
si cette implantation n’a pour rôle que la commercialisation des produits
fabriqués dans le pays d’origine.
Il existe évidemment d’autres motivations spécifiques que nous n’énumérerons
pas ici.
Toutes ces raisons amènent à raisonner au niveau non plus d’une société
unique mais d’entreprises multiples juridiquement et parfois économiquement
distinctes.
Il convient de faire à ce niveau une distinction entre deux types de groupe
de sociétés qui justifient des traitements différents.


a) La séparation en sociétés distinctes est purement juridique

On se trouve dans ce cas lorsqu’il existe plusieurs sociétés juridiquement
distinctes mais qui ne constituent en fait qu’une seule entité économique.
Le schéma ci-dessous illustre cette situation :














L’on admettra que la société industrielle n’a pratiquement qu’un client
unique, la société de distribution. À l’inverse, la société de distribution
n’a pour vocation que de commercialiser les produits fabriqués par
l’affaire industrielle. La holding n’a d’autre rôle que de contrôler les
deux sociétés opérationnelles.
Dans un cas de ce genre, et même si les sociétés sont plus nombreuses,
l’établissement d’un business-plan par société ne présente en général
aucun intérêt dans la mesure où l’ensemble ne constitue dans les faits
qu’une unité économique ayant :

une stratégie unique,

• un financement global,
• souvent une seule direction, même si les postes de président ou de
directeur général ont été répartis entre plusieurs personnes.
On n’élaborera dans ce cas qu’un seul business-plan. Au niveau du
mode de construction des chiffres, il apparaîtra probablement nécessaire
de calculer ceux-ci par société puis de procéder à leur consolidation,
comme on le ferait pour des comptes sociaux. Cette technique
aura pour avantage de permettre des comparaisons ultérieures avec les
réalisations pour chacune des sociétés.


b) La structure juridique correspond à une réalité économique
Tel est le cas lorsque l’existence de sociétés distinctes trouve sa justification
dans :
• l’existence de métiers différents,
• l’existence de clientèle distincte,
• l’existence de zones géographiques (régions, pays) différentes,
• etc.
Dans ce cas, les sociétés sont réellement autonomes et jouissent d’une
liberté d’action plus ou moins grande. Il devra alors être établi un business-
plan pour chacune des sociétés. La finalité de celui-ci sera double :
d’une part, le business-plan aura pour la société concernée toutes les
utilités qui ont déjà été signalées, plus celles qui seront énumérées
dans les pages qui vont suivre ;
d’autre part, le business-plan constituera “le contrat” entre la direction
de la filiale et celle du groupe. Comme dans tout contrat, il
doit donc comporter des engagements réciproques. Ces engagements
sont :
• pour le groupe, de donner à sa filiale les moyens de réaliser ses
objectifs tels qu’ils ont été proposés et acceptés. Ces moyens peuvent
consister soit uniquement en un apport financier (prêts ou
fonds propres), soit en des apports plus complexes (accord
d’approvisionnement, transfert de know-how, assistance technique,
etc.). Il est clair que, pour qu’il y ait engagement du groupe, cela
suppose qu’il y ait, préalablement à la finalisation du businessplan,
un accord sur le contenu de celui-ci entre le groupe et sa
filiale ;


• pour la filiale, de tenir au mieux les objectifs qu’elle s’est fixés et de
réaliser les résultats qui doivent normalement en découler.
Le business-plan devient alors un véritable outil de dialogue entre
le groupe et sa filiale. Il sera le moyen de rendre objectif ce dialogue
dans la mesure où, les rôles et devoirs de chacun ayant été
clairement définis, la constatation des écarts devrait mettre en évidence
des responsabilités claires et non discutables.
Ce processus de dialogue sera repris lors de l’élaboration des budgets
annuels qui ne seront normalement plus qu’un découpage fin
du business-plan.
Notons enfin, dans le cas de société économiquement distincte comme
dans le premier cas examiné, qu’une consolidation du business-plan
sera nécessaire. Cette consolidation permettra de mettre en évidence
l’avenir prévisible du groupe. Elle servira également à mesurer si les
moyens, en particulier financiers du groupe, lui permettront de tenir
l’ensemble des promesses faites aux différentes filiales.


13. L’utilisation du business-plan

pour des opérations exceptionnelles
Comme nous avons tenté de le démontrer, le business-plan peut et doit
être un outil de gestion permanent au service des entreprises et des
groupes. Il est également indispensable de disposer d’un tel document à
l’occasion d’opérations ponctuelles portant sur la composition du capital
d’une entreprise.
Ce sont ces occasions et l’utilisation qui sera alors faite du business-plan
que nous examinerons à présent.


13.1. Les opérations d’acquisition-cession

Que l’on soit en position d’achat ou de vente, se pose toujours un double
problème : définir la valeur objective puis le prix. Ce prix ne sera évidemment
connu qu’à l’issue de la négociation si celle-ci aboutit finalement. Il
n’en est pas moins nécessaire de tenter de définir à quel niveau ce dernier
pourrait se fixer.
Examinons donc l’apport et l’utilisation du business-plan pour la détermination
de ces deux éléments.


131.1. La valeur objective

Celle-ci se définit comme “un prix normatif de transaction entre un
acquéreur et un vendeur qui ne seraient animés que par des motivations
financières”. Il s’agit évidemment d’une approche théorique dont la seule
finalité est de fournir une référence pour une future négociation. Celle-ci
prendra, elle, au contraire, en compte les motivations autres que purement
financières des parties en présence.
Comment s’apprécie cette valeur ?
Il existe de très nombreuses formules d’évaluation que nous n’exposerons
évidemment pas ici. On peut toutefois dans un souci de simplification
dire que toutes ces formules peuvent être ramenées à celle qui suit :




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